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Catéchisme de l'Église catholique -- §1300 à §1399

§1300
Suit le rite essentiel du sacrement. Dans le rite latin, «le sacrement de Confirmation est conféré par l'onction du saint chrême sur le front, faite en imposant la main, et par ces paroles: 'Accipe signaculum doni Spiritus Sancti' ('Sois marqué de l'Esprit Saint, le don de Dieu')» (Paul VI, const. ap. Divinae consortium naturae). Dans les Églises orientales de rite byzantin, l'onction du myron se fait, après une prière d'Epiclèse, sur les parties les plus significatives du corps: le front, les yeux, les narines, les oreilles, les lèvres, la poitrine, le dos, les mains et les pieds; chaque onction étant accompagnée de la formule: «Sfragiz dwreaz Pneumatoz Agiou» («Signaculum doni Spiritus Sancti», «Sceau du don de l'Esprit-Saint» [Rituale per le Chiese orientali di rito bizantino in lingua greca, Pars 1, Vatican 1954 p. 36]).

§1301
Le baiser de paix qui achève le rite du sacrement signifie et manifeste la communion ecclésiale avec l'évêque et avec tous les fidèles (cf. S. Hippolyte, trad. ap. 21).

III. Les effets de la Confirmation

§1302
Il ressort de la célébration que l'effet du sacrement de Confirmation est l'effusion spéciale de l'Esprit Saint, comme elle fut accordée jadis aux Apôtres au jour de la Pentecôte.

§1303
De ce fait, la Confirmation apporte croissance et approfondissement de la grâce baptismale:

-- elle nous enracine plus profondément dans la filiation divine qui nous fait dire «Abba, Père» (Rm 8, 15);

-- elle nous unit plus fermement au Christ;

-- elle augmente en nous les dons de l'Esprit Saint;

-- elle rend notre lien avec l'Église plus parfait (cf. LG 11);

-- elle nous accorde une force spéciale de l'Esprit Saint pour répandre et défendre la foi par la parole et par l'action en vrais témoins du Christ, pour confesser vaillamment le nom du Christ et pour ne jamais éprouver de la honte à l'égard de la croix (cf. DS 1319; LG 11; 12):

Rappelle donc que tu as reçu le signe spirituel, l'Esprit de sagesse et d'intelligence, l'Esprit de conseil et de force, l'Esprit de connaissance et de piété, l'Esprit de la sainte crainte, et garde ce que tu as reçu. Dieu le Père t'a marqué de son signe, le Christ Seigneur t'a confirmé et il a mis en ton coeur le gage de l'Esprit (S. Ambroise, myst. 7, 42: PL 16, 402-403).

§1304
Comme le Baptême dont elle est l'achèvement, la Confirmation est donnée une seule fois. La Confirmation imprime en effet dans l'âme une marque spirituelle indélébile, le «caractère» (cf. DS 1609), qui est le signe de ce que Jésus-Christ a marqué un chrétien du sceau de son Esprit en le revêtant de la force d'en haut pour qu'il soit son témoin (cf. Lc 24, 48-49).

§1305
Le «caractère» perfectionne le sacerdoce commun des fidèles, reçu dans le Baptême, et «le confirmé reçoit la puissance de confesser la foi du Christ publiquement, et comme en vertu d'une charge (quasi ex officio)» (S. Thomas d'A., s. th. 3, 72, 5, ad 2).

IV. Qui peut recevoir ce sacrement?

§1306
Tout baptisé non encore confirmé peut et doit recevoir le sacrement de la Confirmation (cf. CIC, can. 889, § 1). Puisque Baptême, Confirmation et Eucharistie forment une unité, il s'en suit que «les fidèles sont tenus par l'obligation de recevoir ce sacrement en temps opportun» (CIC, can. 890), car sans la Confirmation et l'Eucharistie, le sacrement du Baptême est, certes, valide et efficace, mais l'initiation chrétienne reste inachevée.

§1307
La coutume latine, depuis des siècles, indique «l'âge de la discrétion» comme point de référence pour recevoir la Confirmation. En danger de mort, on doit cependant confirmer les enfants même s'ils n'ont pas encore atteint l'âge de la discrétion (cf. 883, 3).

§1308
Si l'on parle parfois de la Confirmation comme du «sacrement de la maturité chrétienne», il ne faudrait pas pour autant confondre l'âge adulte de la foi avec l'âge adulte de la croissance naturelle, ni oublier que la grâce baptismale est une grâce d'élection gratuite et imméritée qui n'a pas besoin d'une «ratification» pour devenir effective. S. Thomas le rappelle:

L'âge du corps ne constitue pas un préjudice pour l'âme. Ainsi, même dans l'enfance, l'homme peut recevoir la perfection de l'âge spirituel dont parle la Sagesse (4, 8): 'La vieillesse honorable n'est pas celle que donnent de longs jours, elle ne se mesure pas au nombre des années'. C'est ainsi que de nombreux enfants, grâce à la force du Saint-Esprit qu'ils avaient reçue, ont lutté courageusement et jusqu'au sang pour le Christ (Thomas d'A., s. th. 3, 72, 8, ad 2).

§1309
La préparation à la Confirmation doit viser à conduire le chrétien vers une union plus intime au Christ, vers une familiarité plus vive avec l'Esprit Saint, son action, ses dons et ses appels, afin de pouvoir mieux assumer les responsabilités apostoliques de la vie chrétienne. Par là, la catéchèse de la confirmation s'efforcera d'éveiller le sens de l'appartenance à l'Église de Jésus-Christ, tant à l'Église universelle qu'à la communauté paroissiale. Cette dernière porte une responsabilité particulière dans la préparation des confirmands (cf. OCf praenotanda 3).

§1310
Pour recevoir la Confirmation il faut être en état de grâce. Il convient de recourir au sacrement de Pénitence pour être purifié en vue du don du Saint-Esprit. Une prière plus intense doit préparer à recevoir avec docilité et disponibilité la force et les grâces du Saint-Esprit (cf. Ac 1, 14).

§1311
Pour la Confirmation, comme pour le Baptême, il convient que les candidats cherchent l'aide spirituelle d'un parrain ou d'une marraine. Il convient qu'il soit le même que pour le Baptême pour bien marquer l'unité des deux sacrements (cf. OCf praenotanda 5; 6; CIC, can. 893, § 1. 2).

V. Le ministre de la Confirmation

§1312
Le ministre originaire de la Confirmation est l'évêque (LG 26).

En Orient, c'est ordinairement le prêtre qui baptise qui donne aussi immédiatement la Confirmation dans une seule et même célébration. Il le fait cependant avec le saint chrême consacré par le patriarche ou l'évêque, ce qui exprime l'unité apostolique de l'Église dont les liens sont renforcés par le sacrement de Confirmation. Dans l'Église latine on applique la même discipline dans les baptêmes d'adultes ou lorsqu'est admis à la pleine communion avec l'Église un baptisé d'une autre communauté chrétienne qui n'a pas validement le sacrement de confirmation (cf. CIC, can. 883, § 2).

§1313
Dans le rite latin, le ministre ordinaire de la Confirmation est l'évêque (cf. CIC, can. 882). Même si l'évêque peut, en cas de nécessité, concéder la faculté à des prêtres d'administrer la Confirmation (CIC, can. 884, § 2), il convient qu'il la confère lui-même, n'oubliant pas que c'est pour cette raison que la célébration de la Confirmation a été temporellement séparée du Baptême. Les évêques sont les successeurs des apôtres, ils ont reçu la plénitude du sacrement de l'ordre. L'administration de ce sacrement par eux marque bien qu'il a pour effet d'unir ceux qui le reçoivent plus étroitement à l'Église, à ses origines apostoliques et à sa mission de témoigner du Christ.

§1314
Si un chrétien est en danger de mort, tout prêtre peut lui donner la Confirmation (cf. CIC, can. 883, § 3). En effet, l'Église veut qu'aucun de ses enfants, même tout petit, ne sorte de ce monde sans avoir été parfait par l'Esprit Saint avec le don de la plénitude du Christ.

EN BREF

§1315
«Apprenant que la Samarie avait accueilli la parole de Dieu, les Apôtres qui étaient à Jérusalem y envoyèrent Pierre et Jean. Ceux-ci descendirent donc chez les Samaritains et prièrent pour eux, afin que l'Esprit Saint leur fût donné. Car il n'était encore tombé sur aucun d'eux; ils avaient seulement été baptisés au nom du Seigneur Jésus. Alors Pierre et Jean se mirent à leur imposer les mains et ils recevaient l'Esprit Saint» (Ac 8, 14-17).

§1316
La Confirmation parfait la grâce baptismale; elle est le sacrement qui donne l'Esprit Saint pour nous enraciner plus profondément dans la filiation divine, nous incorporer plus fermement au Christ, rendre plus solide notre lien avec l'Église, nous associer davantage à sa mission et nous aider à rendre témoignage de la foi chrétienne par la parole accompagnée des oeuvres.

§1317
La Confirmation, comme le Baptême, imprime dans l'âme du chrétien un signe spirituel ou caractère indélébile; c'est pourquoi on ne peut recevoir ce sacrement qu'une seule fois dans la vie .

§1318
En Orient, ce sacrement est administré immédiatement après le Baptême; il est suivi de la participation à l'Eucharistie, tradition qui met en relief l'unité des trois sacrements de l'initiation chrétienne. Dans l'Église latine on administre ce sacrement lorsque l'âge de raison est atteint, et on en réserve ordinairement la célébration à l'évêque, signifiant ainsi que ce sacrement affermit le lien ecclésial.

§1319
Un candidat pour la Confirmation qui a atteint l'âge de raison doit professer la foi, être en état de grâce, avoir l'intention de recevoir le sacrement et être préparé à assumer son rôle de disciple et de témoin du Christ, dans la communauté ecclésiale et dans les affaires temporelles.

§1320
Le rite essentiel de la Confirmation est l'onction avec le saint chrême sur le front du baptisé (en Orient également sur d'autres organes des sens), avec l'imposition de la main du ministre et les paroles: «Accipe signaculum doni Spiritus Sancti» («Reçois la marque du don de l'Esprit Saint»), dans le rite romain, «Signaculum doni Spiritus Sancti» («Sceau du don de l'Esprit Saint»), dans le rite byzantin.

§1321
Lorsque la Confirmation est célébrée séparément du Baptême, son lien avec le Baptême est exprimé entre autres par le renouvellement des engagements baptismaux. La célébration de la Confirmation au cours de l'Eucharistie contribue à souligner l'unité des sacrements de l'initiation chrétienne.

LE SACREMENT DE L'EUCHARISTIE

§1322
La Sainte Eucharistie achève l'initiation chrétienne. Ceux qui ont été élevés à la dignité du sacerdoce royal par le baptême et configurés plus profondément au Christ par la confirmation, ceux-là, par le moyen de l'Eucharistie, participent avec toute la communauté au sacrifice même du Seigneur.

§1323
«Notre Sauveur, à la dernière Cène, la nuit où il était livré, institua le sacrifice eucharistique de son Corps et de son Sang pour perpétuer le sacrifice de la croix au long des siècles, jusqu'à ce qu'il vienne, et pour confier à l'Église, son Épouse bien-aimée, le mémorial de sa mort et de sa résurrection: sacrement de l'amour, signe de l'unité, lien de la charité, banquet pascal dans lequel le Christ est reçu en nourriture, l'âme est comblée de grâce et le gage de la gloire future nous est donné» (SC 47).

I. L'Eucharistie -- source et sommet de la vie ecclésiale

§1324
L'Eucharistie est «source et sommet de toute la vie chrétienne» (LG 11). «Les autres sacrements ainsi que tous les ministères ecclésiaux et les tâches apostoliques sont tous liés à l'Eucharistie et ordonnés à elle. Car la sainte Eucharistie contient tout le trésor spirituel de l'Église, c'est-à-dire le Christ lui-même, notre Pâque» (PO 5).

§1325
«La communion de vie avec Dieu et l'unité du peuple de Dieu, par lesquelles l'Église est elle-même, l'Eucharistie les signifie et les réalise. En elle se trouve le sommet à la fois de l'action par laquelle, dans le Christ, Dieu sanctifie le monde, et du culte qu'en l'Esprit Saint les hommes rendent au Christ et, par lui, au Père» (CdR, instr. «Eucharisticum mysterium» 6).

§1326
Enfin, par la célébration eucharistique nous nous unissons déjà à la liturgie du ciel et nous anticipons la vie éternelle quand Dieu sera tout en tous (cf. 1 Co 15, 28).

§1327
Bref, l'Eucharistie est le résumé et la somme de notre foi: «Notre manière de penser s'accorde avec l'Eucharistie, et l'Eucharistie en retour confirme notre manière de penser» (S. Irénée, haer. 4, 18, 5).

II. Comment est appelé ce sacrement?

§1328
La richesse inépuisable de ce sacrement s'exprime dans les différents noms qu'on lui donne. Chacun de ces noms en évoque certains aspects. On l'appelle:

Eucharistie parce qu'il est action de grâces à Dieu. Les mots eucharistein (Lc 22, 19; 1 Co 11, 24) et eulogein (Mt 26, 26; Mc 14, 22) rappellent les bénédictions juives qui proclament -- surtout pendant le repas -- les oeuvres de Dieu: la création, la rédemption et la sanctification.

§1329
Repas du Seigneur (cf. 1 Co 11, 20) parce qu'il s'agit de la Cène que le Seigneur a pris avec ses disciples la veille de sa passion et de l'anticipation du repas des noces de l'Agneau (cf. Ap 19, 9) dans la Jérusalem céleste.

Fraction du Pain parce que ce rite, propre au repas juif, a été utilisé par Jésus lorsqu'il bénissait et distribuait le pain en maître de table (cf. Mt 14, 19; 15, 36; Mc 8, 6. 19), surtout lors de la dernière Cène (cf. Mt 26, 26; 1 Co 11, 24). C'est à ce geste que les disciples le reconnaîtront après sa résurrection (cf. Lc 24, 13-35), et c'est de cette expression que les premiers chrétiens désigneront leurs assemblées eucharistiques (cf. Ac 2, 42. 46; 20, 7. 11). Ils signifient par là que tous ceux qui mangent à l'unique pain rompu, le Christ, entrent en communion avec Lui et ne forment plus qu'un seul corps en Lui (cf. 1 Co 10, 16-17).

Assemblée eucharistique (synaxis) parce que l'Eucharistie est célébrée en l'assemblée des fidèles, expression visible de l'Église (cf. 1 Co 11, 17-34).

§1330
Mémorial de la passion et de la résurrection du Seigneur.

Saint Sacrifice, parce qu'il actualise l'unique sacrifice du Christ Sauveur et qu'il inclut l'offrande de l'Église; ou encore saint sacrifice de la messe, «sacrifice de louange» (He 13, 15; cf. Ps 116, 13. 17), sacrifice spirituel (cf. 1 P 2, 5), sacrifice pur (cf. Ml 1, 11) et saint, puisqu'il achève et dépasse tous les sacrifices de l'Ancienne Alliance.

Sainte et divine Liturgie, parce que toute la liturgie de l'Église trouve son centre et son expression la plus dense dans la célébration de ce sacrement; c'est dans le même sens qu'on l'appelle aussi célébration des Saints Mystères. On parle aussi du Très Saint Sacrement parce qu'il est le sacrement des sacrements. On désigne de ce nom les espèces eucharistiques gardées dans le tabernacle.

§1331
Communion, parce que c'est par ce sacrement que nous nous unissons au Christ qui nous rend participants de son Corps et de son Sang pour former un seul corps (cf. 1 Co 10, 16-17); on l'appelle encore les choses saintes: ta hagia; sancta (Const. Ap. 8, 13, 12; Didaché 9, 5; 10, 6) -- c'est le sens premier de la «communion des saints» dont parle le Symbole des Apôtres -, pain des anges, pain du ciel, médicament d'immortalité (S. Ignace d'Antioche, Eph. 20, 2), viatique...

§1332
Sainte Messe parce que la liturgie dans laquelle s'est accompli le mystère du salut, se termine par l'envoi des fidèles («missio») afin qu'ils accomplissent la volonté de Dieu dans leur vie quotidienne.

III. L'eucharistie dans l'économie du salut

Les signes du pain et du vin

§1333
Au coeur de la célébration de l'Eucharistie il y a le pain et le vin qui, par les paroles du Christ et par l'invocation de l'Esprit Saint, deviennent le Corps et le Sang du Christ. Fidèle à l'ordre du Seigneur l'Église continue de faire, en mémoire de Lui, jusqu'à son retour glorieux, ce qu'il a fait la veille de sa passion: «Il prit du pain...», «Il prit la coupe remplie de vin...». En devenant mystérieusement le Corps et le Sang du Christ, les signes du pain et du vin continuent à signifier aussi la bonté de la création. Ainsi, dans l'Offertoire, nous rendons grâce au Créateur pour le pain et le vin (cf. Ps 104, 13-15), fruit «du travail de l'homme», mais d'abord «fruit de la terre» et «de la vigne», dons du Créateur. L'Église voit dans le geste de Melchisédech, roi et prêtre, qui «apporta du pain et du vin» (Gn 14, 18) une préfiguration de sa propre offrande (cf. MR, Canon Romain 95: «Supra quae»).

§1334
Dans l'Ancienne Alliance, le pain et le vin sont offerts en sacrifice parmi les prémices de la terre, en signe de reconnaissance au Créateur. Mais ils reçoivent aussi une nouvelle signification dans le contexte de l'Exode: Les pains azymes qu'Israël mange chaque année à la Pâque, commémorent la hâte du départ libérateur d'Égypte; le souvenir de la manne du désert rappellera toujours à Israël qu'il vit du pain de la Parole de Dieu (cf. Dt 8, 3). Enfin, le pain de tous les jours est le fruit de la Terre promise, gage de la fidélité de Dieu à ses promesses. La «coupe de bénédiction» (1 Co 10, 16), à la fin du repas pascal des juifs, ajoute à la joie festive du vin une dimension eschatologique, celle de l'attente messianique du rétablissement de Jérusalem. Jésus a institué son Eucharistie en donnant un sens nouveau et définitif à la bénédiction du pain et de la coupe.

§1335
Les miracles de la multiplication des pains, lorsque le Seigneur dit la bénédiction, rompit et distribua les pains par ses disciples pour nourrir la multitude, préfigurent la surabondance de cet unique pain de son Eucharistie (cf. Mt 14, 13-21; 15, 32-39). Le signe de l'eau changé en vin à Cana (cf. Jn 2, 11) annonce déjà l'Heure de la glorification de Jésus. Il manifeste l'accomplissement du repas des noces dans le Royaume du Père, où les fidèles boiront le vin nouveau (cf. Mc 14, 25) devenu le Sang du Christ.

§1336
La première annonce de l'Eucharistie a divisé les disciples, tout comme l'annonce de la Passion les a scandalisés: «Ce langage-là est trop fort! Qui peut l'écouter?» (Jn 6, 60). L'Eucharistie et la croix sont des pierres d'achoppement. C'est le même mystère, et il ne cesse d'être occasion de division. «Voulez-vous partir, vous aussi?» (Jn 6, 67): Cette question du Seigneur retentit à travers les âges, invitation de son amour à découvrir que c'est Lui seul qui a «les paroles de la vie éternelle» (Jn 6, 68) et qu'accueillir dans la foi le don de son Eucharistie, c'est l'accueillir Lui-même.

L'institution de l'Eucharistie

§1337
Le Seigneur, ayant aimé les siens, les aima jusqu'à la fin. Sachant que l'heure était venue de partir de ce monde pour retourner à son Père, au cours d'un repas, il leur lava les pieds et leur donna le commandement de l'amour (cf. Jn 13, 1-17). Pour leur laisser un gage de cet amour, pour ne jamais s'éloigner des siens et pour les rendre participants de sa Pâque, il institua l'Eucharistie comme mémorial de sa mort et de sa résurrection, et il ordonna à ses apôtres de le célébrer jusqu'à son retour, «les établissant alors prêtres du Nouveau Testament» (Cc. Trente: DS 1740).

§1338
Les trois évangiles synoptiques et S. Paul nous ont transmis le récit de l'institution de l'Eucharistie; de son côté, S. Jean rapporte les paroles de Jésus dans la synagogue de Capharnaüm, paroles qui préparent l'institution de l'Eucharistie: Le Christ se désigne comme le pain de vie, descendu du ciel (cf. Jn 6).

§1339
Jésus a choisi le temps de la Pâque pour accomplir ce qu'il avait annoncé à Capharnaüm: donner à ses disciples son Corps et son Sang:

Vint le jour des Azymes, où l'on devait immoler la pâque. [Jésus] envoya alors Pierre et Jean: 'Allez dit-il, nous préparer la Pâque, que nous la mangions'... Ils s'en allèrent donc ... et préparèrent la Pâque. L'heure venue, il se mit à table avec ses apôtres et leur dit: 'J'ai désiré avec ardeur manger cette pâque avec vous avant de souffrir; car je vous le dis, je ne la mangerai jamais plus jusqu'à ce qu'elle s'accomplisse dans le Royaume de Dieu' ... Puis, prenant du pain et rendant grâces, il le rompit et le leur donna, en disant: 'Ceci est mon Corps, qui va être donné pour vous; faites ceci en mémoire de moi'. Il fit de même pour la coupe après le repas, disant: ''Cette coupe est la nouvelle Alliance en mon Sang, qui va être versé pour vous' (Lc 22, 7-20; cf. Mt 26, 17-29; Mc 14, 12-25; 1 Co 11, 23-26).

§1340
En célébrant la dernière Cène avec ses apôtres au cours du repas pascal, Jésus a donné son sens définitif à la pâque juive. En effet, le passage de Jésus à son Père par sa mort et sa résurrection, la Pâque nouvelle, est anticipée dans la Cène et célébrée dans l'Eucharistie qui accomplit la pâque juive et anticipe la pâque finale de l'Église dans la gloire du Royaume.

«Faites ceci en mémoire de moi»

§1341
Le commandement de Jésus de répéter ses gestes et ses paroles «jusqu'à ce qu'il vienne», ne demande pas seulement de se souvenir de Jésus et de ce qu'il a fait. Il vise la célébration liturgique, par les apôtres et leurs successeurs, du mémorial du Christ, de sa vie, de sa mort, de sa résurrection et de son intercession auprès du Père.

§1342
Dès le commencement l'Église a été fidèle à l'ordre du Seigneur. De l'Église de Jérusalem il est dit:

Ils se montraient assidus à l'enseignement des apôtres, fidèles à la communion fraternelle, à la fraction du pain et aux prières... Jour après jour, d'un seul coeur, ils fréquentaient assidûment le Temple et rompaient le pain dans leurs maisons, prenant leur nourriture avec joie et simplicité de coeur (Ac 2, 42. 46).

§1343
C'était surtout «le premier jour de la semaine», c'est-à-dire le jour du dimanche, le jour de la résurrection de Jésus, que les chrétiens se réunissaient «pour rompre le pain» (Ac 20, 7). Depuis ces temps-là jusqu'à nos jours la célébration de l'Eucharistie s'est perpétuée, de sorte qu'aujourd'hui nous la rencontrons partout dans l'Église, avec la même structure fondamentale. Elle demeure le centre de la vie de l'Église.

§1344
Ainsi, de célébration en célébration, annonçant le mystère pascal de Jésus «jusqu'à ce qu'Il vienne» (1 Co 11, 26), le peuple de Dieu en pèlerinage «s'avance par la porte étroite de la Croix» (AG 1) vers le banquet céleste, quand tous les élus s'assiéront à la table du Royaume.

IV. La célébration liturgique de l'eucharistie

La messe de tous les siècles

§1345
Dès le deuxième siècle, nous avons le témoignage de S. Justin le Martyr sur les grandes lignes du déroulement de la célébration eucharistique. Elles sont restées les mêmes jusqu'à nos jours pour toutes les grandes familles liturgiques. Voici ce qu'il écrit, vers 155, pour expliquer à l'empereur païen Antonin le Pieux (138-161) ce que font les chrétiens:

[Le jour qu'on appelle jour du soleil, a lieu le rassemblement en un même endroit de tous ceux qui habitent la ville ou la campagne.

On lit les mémoires des Apôtres et les écrits des Prophètes, autant que le temps le permet.

Quand le lecteur a fini, celui qui préside prend la parole pour inciter et exhorter à l'imitation de ces belles choses.

Ensuite, nous nous levons tous ensemble et nous faisons des prières] pour nous-mêmes ... et pour tous les autres, où qu'ils soient, afin que nous soyons trouvés justes par notre vie et nos actions et fidèles aux commandements, pour obtenir ainsi le salut éternel.

Quand les prières sont terminées, nous nous donnons un baiser les uns aux autres.

Ensuite, on apporte à celui qui préside les frères du pain et une coupe d'eau et de vin mélangés.

Il les prend et fait monter louange et gloire vers le Père de l'univers, par le nom du Fils et du Saint-Esprit et il rend grâce (en grec: eucharistian) longuement de ce que nous avons été jugés dignes de ces dons.

Quand il a terminé les prières et les actions de grâce, tout le peuple présent pousse une acclamation en disant: Amen.

Lorsque celui qui préside a fait l'action de grâce et que le peuple a répondu, ceux que chez nous on appelle diacres distribuent à tous ceux qui sont présents du pain, du vin et de l'eau «eucharistiés» et ils en apportent aux absents (S. Justin, apol. 1, 65 [le texte entre crochets est du chapitre 67]).

§1346
La liturgie de l'Eucharistie se déroule selon une structure fondamentale qui s'est conservée à travers les siècles jusqu'à nous. Elle se déploie en deux grands moments qui forment une unité foncière:

-- le rassemblement, la liturgie de la Parole, avec les lectures, l'homélie et la prière universelle;

-- la liturgie eucharistique, avec la présentation du pain et du vin, l'action de grâce consécratoire et la communion.

Liturgie de la Parole et liturgie eucharistique constituent ensemble «un seul et même acte du culte» (SC 56); en effet, la table dressée pour nous dans l'Eucharistie est à la fois celle de la Parole de Dieu et celle du Corps du Seigneur (cf. DV 21).

§1347
N'est-ce pas là le mouvement même du repas pascal de Jésus ressuscité avec ses disciples: chemin faisant, il leur expliquait les Écritures, puis, se mettant à table avec eux, «il prit le pain, dit la bénédiction, le rompit et le leur donna» (cf. Lc 24, 13-35)?

Le mouvement de la célébration

§1348
Tous se rassemblent. Les chrétiens accourent dans un même lieu pour l'assemblée eucharistique. A sa tête le Christ lui-même qui est l'acteur principal de l'Eucharistie. Il est le grand prêtre de la Nouvelle Alliance. C'est Lui-même qui préside invisiblement toute célébration eucharistique. C'est en Le représentant que l'évêque ou le prêtre (agissant «in persona Christi capitis») préside l'assemblée, prend la parole après les lectures, reçoit les offrandes et dit la prière eucharistique. Tous ont leur part active dans la célébration, chacun à sa manière: les lecteurs, ceux qui apportent les offrandes, ceux qui donnent la communion, et le peuple tout entier dont l'Amen manifeste la participation.

§1349
La liturgie de la Parole comporte «les écrits des prophètes», c'est-à-dire l'Ancien Testament, et «les mémoires des apôtres», c'est-à-dire leurs épîtres et les Évangiles; après l'homélie qui exhorte à accueillir cette Parole comme ce qu'elle est vraiment, Parole de Dieu (cf. 1 Th 2, 13), et à la mettre en pratique, viennent les intercessions pour tous les hommes, selon la parole de l'Apôtre: «Je recommande donc, avant tout, qu'on fasse des demandes, des prières, des supplications, des actions de grâces pour tous les hommes, pour les rois et tous les dépositaires de l'autorité» (1 Tm 2, 1-2).

§1350
La présentation des oblats (l'offertoire):on apporte alors, parfois en procession, le pain et le vin à l'autel qui seront offerts par le prêtre au nom du Christ dans le sacrifice eucharistique où ils deviendront le corps et le sang de Celui-ci. C'est le geste même du Christ à la Dernière Cène, «prenant du pain et une coupe». «Cette oblation, l'Église seule l'offre, pure, au Créateur, en lui offrant avec action de grâce ce qui provient de sa création» (S. Irénée, haer. 4, 18, 4; cf. Ml 1, 11). La présentation des oblats à l'autel assume le geste de Melchisédech et confie les dons du créateur entre les mains du Christ. C'est Lui qui, dans Son sacrifice, mène à la perfection toutes les tentatives humaines d'offrir des sacrifices.

§1351
Dès le début, les chrétiens apportent, avec le pain et le vin pour l'Eucharistie, leurs dons pour le partage avec ceux qui sont dans le besoin. Cette coutume de la collecte (cf. 1 Co 16, 1), toujours actuelle, s'inspire de l'exemple du Christ qui s'est fait pauvre pour nous enrichir (cf. 2 Co 8, 9):

Ceux qui sont riches et qui veulent, donnent, chacun selon ce qu'il s'est lui-même imposé; ce qui est recueilli est remis à celui qui préside et lui, il assiste les orphelins et les veuves, ceux que la maladie ou toute autre cause prive de ressources, les prisonniers, les immigrés et, en un mot, il secourt tous ceux qui sont dans le besoin (S. Justin, apol. 1, 67, 6).

§1352
L'anaphore: Avec la prière eucharistique, prière d'action de grâce et de consécration, nous arrivons au coeur et au sommet de la célébration:

Dans la préface l'Église rend grâce au Père, par le Christ, dans l'Esprit Saint, pour toutes ses oeuvres, pour la création, la rédemption et la sanctification. Toute la communauté rejoint alors cette louange incessante que l'Église céleste, les anges et tous les saints, chantent au Dieu trois fois Saint.

§1353
Dans l'épiclèse elle demande au Père d'envoyer son Esprit Saint (ou la puissance de sa bénédiction: cf. MR, Canon Romain 90) sur le pain et le vin, afin qu'ils deviennent, par sa puissance, le Corps et le Sang de Jésus-Christ, et que ceux qui prennent part à l'Eucharistie soient un seul corps et un seul esprit (certaines traditions liturgiques placent l'épiclèse après l'anamnèse).

Dans le récit de l'institution la force des paroles et de l'action du Christ, et la puissance de l'Esprit Saint, rendent sacramentellement présents sous les espèces du pain et du vin son Corps et son Sang, son sacrifice offert sur la croix une fois pour toutes.

§1354
Dans l'anamnèse qui suit, l'Église fait mémoire de la passion, de la résurrection et du retour glorieux du Christ Jésus; elle présente au Père l'offrande de son Fils qui nous réconcilie avec Lui.

Dans les intercessions, l'Église exprime que l'Eucharistie est célébrée en communion avec toute l'Église du ciel et de la terre, des vivants et des défunts, et dans la communion avec les pasteurs de l'Église, le Pape, l'évêque du diocèse, son presbyterium et ses diacres, et tous les évêques du monde entier avec leurs églises.

§1355
Dans la communion, précédée de la prière du Seigneur et de la fraction du pain, les fidèles reçoivent «le pain du ciel» et «la coupe du salut», le Corps et le Sang du Christ qui s'est livré «pour la vie du monde» (Jn 6, 51):

Parce que ce pain et ce vin ont été, selon l'expression ancienne, «eucharistiés», «nous appelons cette nourriture Eucharistie et personne ne peut y prendre part s'il ne croit pas à la vérité de ce qu'on enseigne chez nous, s'il n'a reçu le bain pour la rémission des péchés et la nouvelle naissance et s'il ne vit selon les préceptes du Christ» (S. Justin, apol. 1, 66, 1-2).

V. Le sacrifice sacramentel: action de grâce, mémorial, présence

§1356
Si les chrétiens célèbrent l'Eucharistie depuis les origines, et sous une forme qui, dans sa substance, n'a pas changé à travers la grande diversité des âges et des liturgies, c'est parce que nous nous savons liés par l'ordre du Seigneur, donné la veille de sa passion: «faites ceci en mémoire de moi» (1 Co 11, 24-25).

§1357
Cet ordre du Seigneur, nous l'accomplissons en célébrant le mémorial de son sacrifice. Ce faisant, nous offrons au Père ce qu'il nous a Lui-même donné: les dons de sa création, le pain et le vin, devenus, par la puissance de l'Esprit Saint et par les paroles du Christ, le Corps et le Sang du Christ: le Christ est ainsi rendu réellement et mystérieusement présent.

§1358
Il nous faut donc considérer l'Eucharistie

-- comme action de grâce et louange au Père,

-- comme mémorial sacrificiel du Christ et de son Corps,

-- comme présence du Christ par la puissance de sa Parole et de son Esprit.

L'action de grâce et la louange au Père

§1359
L'Eucharistie, sacrement de notre salut accompli par le Christ sur la croix, est aussi un sacrifice de louange en action de grâce pour l'oeuvre de la création. Dans le sacrifice eucharistique, toute la création aimée par Dieu est présentée au Père à travers la mort et la résurrection du Christ. Par le Christ, l'église peut offrir le sacrifice de louange en action de grâce pour tout ce que Dieu a fait de bon, de beau et de juste dans la création et dans l'humanité.

§1360
L'Eucharistie est un sacrifice d'action de grâce au Père, une bénédiction par laquelle l'église exprime sa reconnaissance à Dieu pour tous ses bienfaits, pour tout ce qu'il a accompli par la création, la rédemption et la sanctification. Eucharistie signifie d'abord: action de grâce.

§1361
L'Eucharistie est aussi le sacrifice de louange, par lequel l'église chante la gloire de Dieu au nom de toute la création. Ce sacrifice de louange n'est possible qu'à travers le Christ: Il unit les fidèles à sa personne, à sa louange et à son intercession, en sorte que le sacrifice de louange au Père est offert par le Christ et avec lui pour être accepté en lui.

Le mémorial sacrificiel du Christ et de son Corps, l'église

§1362
L'Eucharistie est le mémorial de la Pâque du Christ, l'actualisation et l'offrande sacramentelle de son unique sacrifice, dans la liturgie de l'église qui est son Corps. Dans toutes les prières eucharistiques nous trouvons, après les paroles de l'institution, une prière appelée anamnèse ou mémorial.

§1363
Dans le sens de l'écriture Sainte le mémorial n'est pas seulement le souvenir des événements du passé, mais la proclamation des merveilles que Dieu a accomplies pour les hommes (cf. Ex 13, 3). Dans la célébration liturgique de ces événements, ils deviennent d'une certaine façon présents et actuels. C'est de cette manière qu'Israël comprend sa libération d'égypte: chaque fois qu'est célébrée la pâque, les événements de l'Exode sont rendus présents à la mémoire des croyants afin qu'ils y conforment leur vie.

§1364
Le mémorial reçoit un sens nouveau dans le Nouveau Testament. Quand l'église célèbre l'Eucharistie, elle fait mémoire de la Pâque du Christ, et celle-ci devient présente: le sacrifice que le Christ a offert une fois pour toutes sur la Croix demeure toujours actuel (cf. He 7, 25-27): «Toutes les fois que le sacrifice de la croix par lequel le Christ notre pâque a été immolé se célèbre sur l'autel, l'oeuvre de notre rédemption s'opère» (LG 3).

§1365
Parce qu'elle est mémorial de la Pâque du Christ, l'Eucharistie est aussi un sacrifice. Le caractère sacrificiel de l'Eucharistie est manifesté dans les paroles mêmes de l'institution: «Ceci est mon Corps qui va être donné pour vous» et «Cette coupe est la nouvelle Alliance en mon Sang, qui va être versé pour vous» (Lc 22, 19-20). Dans l'Eucharistie le Christ donne ce corps même qu'il a livré pour nous sur la croix, le sang même qu'il a «répandu pour une multitude en rémission des péchés» (Mt 26, 28).

§1366
L'Eucharistie est donc un sacrifice parce qu'elle représente (rend présent) le sacrifice de la croix, parce qu'elle en est le mémorial et parce qu'elle en applique le fruit:

[Le Christ] notre Dieu et Seigneur, s'offrit lui-même à Dieu le Père une fois pour toutes, mourant en intercesseur sur l'autel de la Croix, afin de réaliser pour eux (les hommes) une rédemption éternelle. Cependant, comme sa mort ne devait pas mettre fin à son sacerdoce (He 7, 24. 27), à la dernière Cène, «la nuit où il fut livré» (1 Co 11, 13), il voulait laisser à l'église, son épouse bien-aimée, un sacrifice visible (comme le réclame la nature humaine), où serait représenté le sacrifice sanglant qui allait s'accomplir une unique fois sur la croix, dont la mémoire se perpétuerait jusqu'à la fin des siècles (1 Co 11, 23) et dont la vertu salutaire s'appliquerait à la rédemption des péchés que nous commettons chaque jour (Cc. Trente: DS 1740).

§1367
Le sacrifice du Christ et le sacrifice de l'Eucharistie sont un unique sacrifice: «C'est une seule et même victime, c'est le même qui offre maintenant par le ministère des prêtres, qui s'est offert lui-même alors sur la Croix. Seule la manière d'offrir diffère» (Cc. Trente, sess. 22a, Doctrina de ss. Missae sacrificio, c. 2: DS 1743). «Et puisque dans ce divin sacrifice qui s'accomplit à la messe, ce même Christ, qui s'est offert lui-même une fois de manière sanglante sur l'autel de la Croix, est contenu et immolé de manière non sanglante, ce sacrifice est vraiment propitiatoire» (ibid.).

§1368
L'Eucharistie est également le sacrifice de l'église. L'église, qui est le Corps du Christ, participe à l'offrande de son Chef. Avec Lui, elle est offerte elle-même tout entière. Elle s'unit à son intercession auprès du Père pour tous les hommes. Dans l'Eucharistie, le sacrifice du Christ devient aussi le sacrifice des membres de son Corps. La vie des fidèles, leur louange, leur souffrance, leur prière, leur travail, sont unis à ceux du Christ et à sa totale offrande, et acquièrent ainsi une valeur nouvelle. Le sacrifice du Christ présent sur l'autel donne à toutes les générations de chrétiens la possibilité d'être unis à son offrande.

Dans les catacombes, l'église est souvent représentée comme une femme en prière, les bras largement ouverts en attitude d'orante. Comme le Christ qui a étendu les bras sur la croix, par lui, avec lui et en lui, elle s'offre et intercède pour tous les hommes.

§1369
Toute l'église est unie à l'offrande et à l'intercession du Christ. Chargé du ministère de Pierre dans l'église, le Pape est associé à toute célébration de l'Eucharistie où il est nommé comme signe et serviteur de l'unité de l'église Universelle. L'évêque du lieu est toujours responsable de l'eucharistie, même lorsqu'elle est présidée par un prêtre; son nom y est prononcé pour signifier sa présidence de l'église particulière, au milieu du presbyterium et avec l'assistance des diacres. La communauté intercède aussi pour tous les ministres qui, pour elle et avec elle, offrent le sacrifice eucharistique:

Que cette eucharistie seule soit regardée comme légitime, qui se fait sous la présidence de l'évêque ou de celui qu'il en a chargé (S. Ignace d'Antioche, Smyrn. 8, 1).

C'est par le ministère des prêtres que se consomme le sacrifice spirituel des chrétiens, en union avec le sacrifice du Christ, unique Médiateur, offert au nom de toute l'église dans l'Eucharistie par les mains des prêtres, de manière non sanglante et sacramentelle, jusqu'à ce que vienne le Seigneur lui-même (PO 2).

§1370
A l'offrande du Christ s'unissent non seulement les membres qui sont encore ici-bas, mais aussi ceux qui sont déjà dans la gloire du ciel: C'est en communion avec la très Sainte Vierge Marie et en faisant mémoire d'elle, ainsi que de tous les saints et toutes les saintes, que l'église offre le sacrifice eucharistique. Dans l'Eucharistie l'église, avec Marie, est comme au pied de la Croix, unie à l'offrande et à l'intercession du Christ.

§1371
Le sacrifice eucharistique est aussi offert pour les fidèles défunts «qui sont morts dans le Christ et ne sont pas encore pleinement purifiés» (Cc. Trente: DS 1743), pour qu'ils puissent entrer dans la lumière et la paix du Christ:

Enterrez ce corps n'importe où ! Ne vous troublez pas pour lui d'aucun souci ! Tout ce que je vous demande, c'est de vous souvenir de moi à l'autel du Seigneur où que vous soyez» (S. Monique, avant sa mort, à S. Augustin et son frère; conf. 9, 11, 27).

Ensuite, nous prions [dans l'anaphore] pour les saints pères et évêques endormis, et en général pour tous ceux qui se sont endormis avant nous, en croyant qu'il y aura très grand profit pour les âmes, en faveur desquelles la supplication est offerte, tandis que se trouve présente la sainte et si redoutable victime... En présentant à Dieu nos supplications pour ceux qui se sont endormis, fussent-ils pécheurs, nous ... présentons le Christ immolé pour nos péchés, rendant propice, pour eux et pour nous, le Dieu ami des hommes (S. Cyrille de Jérusalem, catech. myst. 5, 9. 10: PG 33, 1116B-1117A).

§1372
S. Augustin a admirablement résumé cette doctrine qui nous incite à une participation de plus en plus complète au sacrifice de notre Rédempteur que nous célébrons dans l'Eucharistie:

Cette cité rachetée tout entière, c'est-à-dire l'assemblée et la société des saints, est offerte à Dieu comme un sacrifice universel par le Grand Prêtre qui, sous la forme d'esclave, est allé jusqu'à s'offrir pour nous dans sa passion, pour faire de nous le corps d'un si grand Chef ... Tel est le sacrifice des chrétiens: «à plusieurs, n'être qu'un seul corps dans le Christ» (Rm 12, 5). Et ce sacrifice, l'église ne cesse de le reproduire dans le Sacrement de l'autel bien connu des fidèles, où il lui est montré que dans ce qu'elle offre, elle est elle-même offerte (S. Augustin, civ. 10, 6).

La présence du Christ par la puissance de sa Parole et de l'Esprit Saint

§1373
«Le Christ Jésus qui est mort, qui est ressuscité, qui est à la droite de Dieu, qui intercède pour nous» (Rm 8, 34), est présent de multiples manières à son église (cf. LG 48): dans sa Parole, dans la prière de son église, «là où deux ou trois sont rassemblés en mon nom» (Mt 18, 20), dans les pauvres, les malades, les prisonniers (Mt 25, 31-46), dans ses sacrements dont il est l'auteur, dans le sacrifice de la messe et en la personne du ministre. Mais «au plus haut point (il est présent) sous les espèces eucharistiques» (SC 7).

§1374
Le mode de présence du Christ sous les espèces eucharistiques est unique. Il élève l'Eucharistie au-dessus de tous les sacrements et en fait «comme la perfection de la vie spirituelle et la fin à laquelle tendent tous les sacrements» (S. Thomas d'A., s. th. 3, 73, 3). Dans le très saint sacrement de l'Eucharistie sont «contenus vraiment, réellement et substantiellement le Corps et le Sang conjointement avec l'âme et la divinité de notre Seigneur Jésus-Christ, et, par conséquent, le Christ tout entier» (Cc Trente: DS 1651). «Cette présence, on la nomme ‘réelle', non à titre exclusif, comme si les autres présences n'étaient pas ‘réelles', mais par excellence parce qu'elle est substantielle, et que par elle le Christ, Dieu et homme, se rend présent tout entier» (MF 39).

§1375
C'est par la conversion du pain et du vin au le Corps et au Sang du Christ que le Christ devient présent en ce sacrement. Les Pères de l'église ont fermement affirmé la foi de l'église en l'efficacité de la Parole du Christ et de l'action de l'Esprit Saint pour opérer cette conversion. Ainsi, S. Jean Chrysostome déclare:

Ce n'est pas l'homme qui fait que les choses offertes deviennent Corps et Sang du Christ, mais le Christ lui-même qui a été crucifié pour nous. Le prêtre, figure du Christ, prononce ces paroles, mais leur efficacité et la grâce sont de Dieu. Ceci est mon Corps, dit-il. Cette parole transforme les choses offertes (prod. Jud. 1, 6: PG 49, 380C).

Et saint Ambroise dit au sujet de cette conversion:

Soyons bien persuadés que ceci n'est pas ce que la nature a formé, mais ce que la bénédiction a consacré, et que la force de la bénédiction l'emporte sur celle de la nature, parce que par la bénédiction la nature elle-même se trouve changée ... La parole du Christ, qui a pu faire de rien ce qui n'existait pas, ne pourrait donc changer les choses existantes en ce qu'elles n'étaient pas encore ? Car ce n'est pas moins de donner aux choses leur nature première que de la leur changer (myst. 9, 50. 52: PL 16, 405-406).

§1376
Le Concile de Trente résume la foi catholique en déclarant: «Parce que le Christ, notre Rédempteur, a dit que ce qu'il offrait sous l'espèce du pain était vraiment son Corps, on a toujours eu dans l'église cette conviction, que déclare le saint Concile de nouveau: par la consécration du pain et du vin s'opère le changement de toute la substance du pain en la substance du Corps du Christ notre Seigneur et de toute la substance du vin en la substance de son Sang; ce changement, l'église catholique l'a justement et exactement appelé transsubstantiation» (DS 1642).

§1377
La présence eucharistique du Christ commence au moment de la consécration et dure aussi longtemps que les espèces eucharistiques subsistent. Le Christ est tout entier présent dans chacune des espèces et tout entier dans chacune de leurs parties, de sorte que la fraction du pain ne divise pas le Christ (cf. Cc. Trente: DS 1641).

§1378
Le culte de l'Eucharistie. Dans la liturgie de la messe, nous exprimons notre foi en la présence réelle du Christ sous les espèces du pain et du vin, entre autres, en fléchissant les genoux, ou en nous inclinant profondément en signe d'adoration du Seigneur. «L'église catholique a rendu et continue de rendre ce culte d'adoration qui est dû au sacrement de l'Eucharistie non seulement durant la messe, mais aussi en dehors de sa célébration: en conservant avec le plus grand soin les hosties consacrées, en les présentant aux fidèles pour qu'ils les vénèrent avec solennité, en les portant en procession» (MF 56).

§1379
La sainte réserve (tabernacle) était d'abord destinée à garder dignement l'Eucharistie pour qu'elle puisse être portée aux malades et aux absents en dehors de la messe. Par l'approfondissement de la foi en la présence réelle du Christ dans son Eucharistie, l'église a pris conscience du sens de l'adoration silencieuse du Seigneur présent sous les espèces eucharistiques. C'est pour cela que le tabernacle doit être placé à un endroit particulièrement digne de l'église; il doit être construit de telle façon qu'il souligne et manifeste la vérité de la présence réelle du Christ dans le saint sacrement.

§1380
Il est hautement convenable que le Christ ait voulu rester présent à son église de cette façon unique. Puisque le Christ allait quitter les siens sous sa forme visible, il voulait nous donner sa présence sacramentelle; puisqu'il allait s'offrir sur la Croix pour nous sauver, il voulait que nous ayons le mémorial de l'amour dont il nous a aimés «jusqu'à la fin» (Jn 13, 1), jusqu'au don de sa vie. En effet, dans sa présence eucharistique il reste mystérieusement au milieu de nous comme celui qui nous a aimés et qui s'est livré pour nous (cf. Ga 2, 20), et il le reste sous les signes qui expriment et communiquent cet amour:

L'église et le monde ont un grand besoin du culte eucharistique. Jésus nous attend dans ce sacrement de l'amour. Ne refusons pas le temps pour aller Le rencontrer dans l'adoration, dans la contemplation pleine de foi et ouverte à réparer les fautes graves et les délits du monde. Que ne cesse jamais notre adoration (Jean Paul II, l. «Dominicæ cenæ» 3).

§1381
«La présence du véritable Corps du Christ et du véritable Sang du Christ dans ce sacrement, ‘on ne l'apprend point par les sens, dit S. Thomas, mais par la foi seule, laquelle s'appuie sur l'autorité de Dieu'. C'est pourquoi, commentant le texte de S. Luc, 22, 19: ‘Ceci est mon Corps qui sera livré pour vous', saint Cyrille d'Alexandrie (Lc. 22, 19: PG 72, 921B) déclare: ‘Ne va pas te demander si c'est vrai, mais accueille plutôt avec foi les paroles du Seigneur, parce que lui, qui est la Vérité, ne ment pas'» (Thomas d'A., s. th. 3, 75, 1 cité par Paul VI, MF 18):

Adoro te devote, latens Deitas,
Quae sub his figuris vere latitas:
Tibi se cor meum totum subjicit,
Quia te contemplans totum deficit.

Je T'adore profondément, divinité cachée,
vraiment présente sous ces apparences;
à Toi mon coeur se soumet tout entier
parce qu'à Te contempler, tout entier il défaille

Visus, gustus, tactus in te fallitur,
Sed auditu solo tuto creditur:
Credo quidquid dixit Dei Filius:
Nil hoc Veritatis verbo verius.

La vue, le goût, le toucher ne T'atteignent pas:
à ce qu'on entend dire seulement il faut se fier;
je crois tout ce qu'a dit le Fils de Dieu;
rien de plus vrai que cette parole de la Vérité.

VI. Le banquet pascal

§1382
La messe est à la fois et inséparablement le mémorial sacrificiel dans lequel se perpétue le sacrifice de la croix, et le banquet sacré de la communion au Corps et au Sang du Seigneur. Mais la célébration du sacrifice eucharistique est toute orientée vers l'union intime des fidèles au Christ par la communion. Communier, c'est recevoir le Christ lui-même qui s'est offert pour nous.

§1383
L'autel, autour duquel l'Église est rassemblée dans la célébration de l'Eucharistie, représente les deux aspects d'un même mystère: l'autel du sacrifice et la table du Seigneur, et ceci d'autant plus que l'autel chrétien est le symbole du Christ lui-même, présent au milieu de l'assemblée de ses fidèles, à la fois comme la victime offerte pour notre réconciliation et comme aliment céleste qui se donne à nous. «Qu'est-ce en effet l'autel du Christ sinon l'image du Corps du Christ?» -- dit S. Ambroise (sacr. 5, 7: PL 16, 447C), et ailleurs: «L'autel représente le Corps [du Christ], et le Corps du Christ est sur l'autel» (sacr. 4, 7: PL 16, 437D). La liturgie exprime cette unité du sacrifice et de la communion dans de nombreuses prières. Ainsi, l'Église de Rome prie dans son anaphore:

Supplices te rogamus, omnipotens Deus, jube haec perferri per manus sancti Angeli tui in sublime altare tuum, in conspectu divinae majestatis: ut quotquot ex hac altaris participatione sacrosanctum Filii tui Corpus et Sanguinem sumpserimus, omni benedictione caelesti et gratia repleamur.

Nous T'en supplions, Dieu Tout-Puissant: que [cette offrande] soit portée par ton ange en présence de ta gloire, sur ton autel céleste, afin qu'en recevant ici, par notre communion à cet autel, le corps et le sang de ton Fils, nous soyons comblés de ta grâce et de tes bénédictions.

«Prenez et mangez en tous»: la communion

§1384
Le Seigneur nous adresse une invitation pressante à le recevoir dans le sacrement de l'Eucharistie: «En vérité, en vérité, je vous le dis, si vous ne mangez la Chair du Fils de l'homme et ne buvez son Sang, vous n'aurez pas la vie en vous» (Jn 6, 53).

§1385
Pour répondre à cette invitation, nous devons nous préparer à ce moment si grand et si saint. S. Paul exhorte à un examen de conscience: «Quiconque mange ce pain ou boit cette coupe du Seigneur indignement aura à répondre du Corps et du Sang du Seigneur. Que chacun donc s'éprouve soi-même et qu'il mange alors de ce pain et boive de cette coupe; car celui qui mange et boit, mange et boit sa propre condamnation, s'il n'y discerne le Corps» (1 Co 11, 27-29). Celui qui est conscient d'un péché grave doit recevoir le sacrement de la Réconciliation avant d'accéder à la communion.

§1386
Devant la grandeur de ce sacrement, le fidèle ne peut que reprendre humblement et avec une foi ardente la parole du Centurion (cf. Mt 8, 8): «Domine, non sum dignus, ut intres sub tectum meum, sed tantum dic verbum, et sanabitur anima mea» («Seigneur, je ne suis pas digne de te recevoir, mais dis seulement une parole et je serai guéri»). Et dans la Divine Liturgie de S. Jean Chrysostome, les fidèles prient dans le même esprit:

A ta cène mystique fais-moi communier aujourd'hui, ô Fils de Dieu. Car je ne dirai pas le Secret à tes ennemis, ni ne te donnerai le baiser de Judas. Mais, comme le larron, je te crie: Souviens-toi de moi, Seigneur, dans ton royaume.

§1387
Pour se préparer convenablement à recevoir ce sacrement, les fidèles observeront le jeûne prescrit dans leur Église (cf. CIC, can. 919). L'attitude corporelle (gestes, vêtement) traduira le respect, la solennité, la joie de ce moment où le Christ devient notre hôte.

§1388
Il est conforme au sens même de l'Eucharistie que les fidèles, s'ils ont les dispositions requises (cf. CIC 916), communient quand ils participent à la messe (Dans la même journée, les fidèles peuvent recevoir la très Sainte Communion deux fois, et seulement deux fois [cf. Pontificia Commissio Codicis Iuris Canonici authentice interpretando, Responsa ad proposita dubia, 1: AAS 76 (1984), p. 746]): «Il est vivement recommandé aux fidèles de participer à la Messe de façon plus parfaite en recevant aussi, après la communion du prêtre, le corps du Seigneur du même sacrifice» (SC 55).

§1389
L'Église fait obligation aux fidèles de participer les dimanches et les jours de fête à la divine liturgie (cf. Oe 15) et de recevoir au moins une fois par an l'Eucharistie, si possible au temps pascal (cf. CIC, can. 920), préparés par le sacrement de la Réconciliation. Mais l'Église recommande vivement aux fidèles de recevoir la sainte Eucharistie les dimanches et les jours de fête, ou plus souvent encore, même tous les jours.

§1390
Grâce à la présence sacramentelle du Christ sous chacune des espèces, la communion à la seule espèce du pain permet de recevoir tout le fruit de grâce de l'Eucharistie. Pour des raisons pastorales, cette manière de communier s'est légitimement établie comme la plus habituelle dans le rite latin. «La sainte communion réalise plus pleinement sa forme de signe lorsqu'elle se fait sous les deux espèces. Car, sous cette forme, le signe du banquet eucharistique est mis plus pleinement en lumière» (IGMR 240). C'est la forme habituelle de communier dans les rites orientaux.

Les fruits de la communion

§1391
La communion accroît notre union au Christ. Recevoir l'Eucharistie dans la communion porte comme fruit principal l'union intime au Christ Jésus. Le Seigneur dit en effet: «Qui mange ma Chair et boit mon Sang demeure en moi et moi en lui» (Jn 6, 56). La vie en Christ trouve son fondement dans le banquet eucharistique: «De même qu'envoyé par le Père, qui est vivant, moi, je vis par le Père, de même, celui qui me mange, vivra, lui aussi, par moi» (Jn 6, 57):

Lorsque dans les fêtes du Seigneur les fidèles reçoivent le Corps du Fils, ils proclament les uns aux autres la Bonne Nouvelle que les arrhes de la vie sont donnés, comme lorsque l'ange dit à Marie de Magdala: «Le Christ est ressuscité!» Voici que maintenant aussi la vie et la résurrection sont conférées à celui qui reçoit le Christ (Fanqîth, Office syriaque d'Antioche, volume 1, Commun, 237a-b).

§1392
Ce que l'aliment matériel produit dans notre vie corporelle, la communion le réalise de façon admirable dans notre vie spirituelle. La communion à la Chair du Christ ressuscité, «vivifiée par l'Esprit Saint et vivifiante» (PO 5), conserve, accroît et renouvelle la vie de grâce reçue au Baptême. Cette croissance de la vie chrétienne a besoin d'être nourrie par la communion eucharistique, pain de notre pèlerinage, jusqu'au moment de la mort, où il nous sera donné comme viatique.

§1393
La communion nous sépare du péché. Le Corps du Christ que nous recevons dans la communion est «livré pour nous», et le Sang que nous buvons, est «versé pour la multitude en rémission des péchés». C'est pourquoi l'Eucharistie ne peut pas nous unir au Christ sans nous purifier en même temps des péchés commis et nous préserver des péchés futurs:

«Chaque fois que nous le recevons, nous annonçons la mort du Seigneur» (1 Co 11, 26). Si nous annonçons la mort du Seigneur, nous annonçons la rémission des péchés. Si, chaque fois que son Sang est répandu, il est répandu pour la rémission des péchés, je dois toujours le recevoir, pour que toujours il remette mes péchés. Moi qui pèche toujours, je dois avoir toujours un remède (S. Ambroise, sacr. 4, 28: PL 16, 446A).

§1394
Comme la nourriture corporelle sert à restaurer la perte des forces, l'Eucharistie fortifie la charité qui, dans la vie quotidienne, tend à s'affaiblir; et cette charité vivifiée efface les péchés véniels (cf. Cc. Trente: DS 1638). En se donnant à nous, le Christ ravive notre amour et nous rend capables de rompre les attachements désordonnés aux créatures et de nous enraciner en Lui:

Puisque le Christ est mort pour nous par amour, lorsque nous faisons mémoire de sa mort au moment du sacrifice, nous demandons que l'amour nous soit accordé par la venue du Saint-Esprit; nous prions humblement qu'en vertu de cet amour, par lequel le Christ a voulu mourir pour nous, nous aussi, en recevant la grâce du Saint-Esprit, nous puissions considérer le monde comme crucifié pour nous, et être nous-mêmes crucifiés pour le monde... Ayant reçu le don de l'amour, mourons au péché et vivons pour Dieu (S. Fulgence de Ruspe, Fab. 28, 16-19: CCL 19A, 813-814: LH, sem. 28, lundi, off. lect.).

§1395
Par la même charité qu'elle allume en nous, l'Eucharistie nous préserve des péchés mortels futurs. Plus nous participons à la vie du Christ et plus nous progressons dans son amitié, plus il nous est difficile de rompre avec Lui par le péché mortel. L'Eucharistie n'est pas ordonnée au pardon des péchés mortels. Ceci est propre au sacrement de la Réconciliation. Le propre de l'Eucharistie est d'être le sacrement de ceux qui sont dans la pleine communion de l'Église.

§1396
L'unité du Corps mystique: l'Eucharistie fait l'Église. Ceux qui reçoivent l'Eucharistie sont unis plus étroitement au Christ. Par là même, le Christ les unit à tous les fidèles en un seul corps: l'Église. La communion renouvelle, fortifie, approfondit cette incorporation à l'Église déjà réalisée par le Baptême. Dans le Baptême nous avons été appelés à ne faire qu'un seul corps (cf. 1 Co 12, 13). L'Eucharistie réalise cet appel: «La coupe de bénédiction que nous bénissons n'est-elle pas communion au Sang du Christ? Le pain que nous rompons, n'est-il pas communion au Corps du Christ? Puisqu'il n'y a qu'un pain, à nous tous nous ne formons qu'un corps, car tous nous avons part à ce pain unique» (1 Co 10, 16-17):

Si vous êtes le corps du Christ et ses membres, c'est votre sacrement qui est placé sur la table du Seigneur, vous recevez votre sacrement. Vous répondez «Amen» («oui, c'est vrai!») à ce que vous recevez, et vous y souscrivez en répondant. Tu entends ce mot: «le Corps du Christ» et tu réponds: «Amen». Sois donc un membre du Christ pour que soit vrai ton Amen (S. Augustin, serm. 272: PL 38, 1247).

§1397
L'Eucharistie engage envers les pauvres: Pour recevoir dans la vérité le Corps et le Sang du Christ livrés pour nous, nous devons reconnaître le Christ dans les plus pauvres, Ses frères (cf. Mt 25, 40):

Tu as goûté au sang du Seigneur et tu ne reconnais pas même ton frère. Tu déshonores cette table même, en ne jugeant pas digne de partager ta nourriture celui qui a été jugé digne de prendre part à cette table. Dieu t'a libéré de tous tes péchés et t'y a invité. Et toi, pas même alors, tu n'es devenu plus miséricordieux (S. Jean Chrysostome, hom. in 1 Cor. 27, 4: PG 61, 229-230).

§1398
L'Eucharistie et l'unité des chrétiens. Devant la grandeur de ce mystère, S. Augustin s'écrie: «O sacrement de la piété! O signe de l'unité! O lien de la charité!» (ev. Jo. 26, 6, 13; cf. SC 47). D'autant plus douloureuses se font ressentir les divisions de l'Église qui rompent la commune participation à la table du Seigneur, d'autant plus pressantes sont les prières au Seigneur pour que reviennent les jours de l'unité complète de tous ceux qui croient en Lui.

§1399
Les Églises orientales qui ne sont pas en pleine communion avec l'Église catholique célèbrent l'Eucharistie avec un grand amour. «Ces Églises, bien que séparées, ont de vrais sacrements, -- principalement, en vertu de la succession apostolique: le Sacerdoce et l'Eucharistie, -- qui les unissent intimement à nous» (UR 15). Une certaine communion in sacris, donc dans l'Eucharistie, est «non seulement possible, mais même recommandée, lors de circonstances favorables et avec l'approbation de l'autorité ecclésiastique» (UR 15; cf. CIC, can. 844, § 3).

Catéchisme de l'Église catholique © Libreria Editrice Vaticana 1992.

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